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Pourquoi avoir postulé à ce poste pour poste ?
H.A : J’avais déjà vécu à l’étranger en tant qu’étudiante et cela faisait longtemps que j’avais envie de retourner dans un pays anglophone dans un cadre professionnel pour prendre un peu de recul sur mes pratiques pédagogiques. Voir ce qui se pratiquait ailleurs m’attirait. Par ailleurs, je souhaitais découvrir les États-Unis. Le proviseur de l’époque a totalement soutenu mon projet, ma famille était partante, alors j’ai dit « Banco ».
Comment s’est passée votre intégration là-bas ?
H.A : La bonne surprise a été la qualité de l’accueil qui m’a été réservé. La semaine de stage à Columbus sur la culture américaine, la façon d’enseigner, les acronymes…, a été très riche. Ce fut très efficace et convivial et je me suis sentie parfaitement préparée pour effectuer ma rentrée à Shaker Heights. Là, une tutrice m’a tout de suite aidée à m’intégrer. J’ai ainsi plus surmonter plus facilement les obstacles liés à la découverte d’un nouveau mode de fonctionnement professionnel. En fait, grâce à cet accueil, je n’ai jamais eu l’impression d’être en difficulté.
Comment ont réagi les collègues et vos élèves?
H.A : Les élèves étaient intrigués. Pour certains d’entre eux, c’était de l’ordre de l’impensable d’avoir une enseignante étrangère. Mais le dialogue avec eux a été très intéressant. Comme Shaker Heights est un lycée tourné vers l’international, les collègues n’ont pas été si surpris que ça. Tout s’est passé très naturellement.
J-M G : Ici, à Flaubert, nous avons également porté l’accent sur l’accueil du collègue américain. Il a par contre été troublé par notre façon d’évaluer les élèves. Sa propre fille a été très surprise. Les Américains ont un regard nettement plus positif, mais il s’est vite adapté à notre façon d’évaluer.
Pouvez-vous comparer les deux systèmes éducatifs ?
J-M G : L’enseignant américain notait ses élèves sur ce qu’ils savaient faire, alors qu’en France, on note sur ce qu’ils ne savent pas faire ; ça inverse complètement le regard.
H.A : Aux États-Unis, les enseignants ont un regard plus bienveillant, ils cherchent à encourager et rassurer leurs élèves de manière permanente. Je suis restée une enseignante française aux États-Unis mais mon rapport aux élèves a changé. Là-bas, les professeurs sont plus proches de leurs élèves, plus à l’écoute. Ils passent plus de temps avec eux, avec notamment des séances hebdomadaires de tutorat. C’est essentiel de connaître ses élèves et de l’intégrer dans ses cours pour créer des ponts et des liens.
Votre façon d’enseigner en France a-t-elle changé ?
H.A : Au niveau de l’enseignement des langues, il n’y a pas tant de différences. Ce qui m’a fait réfléchir et que j’essaie d’appliquer, c’est justement ce fait de mieux connaître mes élèves. En France, on n’a pas l’espace pour le faire, on voit la classe en bloc uniquement 2 à 3 heures par semaine. J’essaie de faire plus attention à eux, découvrir qui ils sont, ce qui me permet de leur donner des travaux à la maison plus ciblés et plus individualisés. La question du tutorat m’intéresse aussi mais c’est difficile à mettre en place dans notre système. J’ai commencé en proposant des créneaux à mes élèves mais tous ne viennent pas, loin de là. Il y a une petite révolution culturelle à faire à ce niveau-là. Il faudrait pouvoir l’inscrire d’une manière ou d’une autre dans nos emplois du temps.
J-M G : On se donne l’obligation avec Hélène Ameline de communiquer cette expérience auprès de la communauté éducative. On va lui offrir un temps d’échange avec ses collègues. Nous allons mettre en place un temps d’écriture sur un projet qui va fédérer les forces de chacun. J’attends ce moment avec plaisir. Mais ça ne se fera pas du jour au lendemain, il faut du temps.
Si c’était à refaire ?
H.A : Je le referais, sans hésiter !
J-M G : Je suis très content de ce genre d’expérience dans mon établissement et je suis fier pour elle.
Mise à jour : janvier 2021